Mon Ket

Le cinéma est également un attrait majeur de ma vie.

Mon Ket…

Autant vous le dire, je n’ai jamais été un fan réel de François l’Embrouille ni de caméra cachées en général. Les caméras cachées pour moi se sont toujours divisées en deux catégories : les ratées sans aucun intérêt, et les réussies où je m’identifiais tellement aux victimes que je les supportais avec généralement beaucoup de difficulté.

Je suis tombé il y a quelques jours sur l’interview de François Damiens ety Benoît mariage dans “Entrez sans Frapper”, et ce moment de radio très réussi m’a donné envie d’aller voir le film. Je me suis donc exécuté ce dimanche après-midi dans une salle pratiquement déserte du Stuart à La Louvière.

Mon Ket

L’OVNI total

Ce premier film de Damiens, il faut de suite lui en planter le contexte. Il s’agit d’un projet que François a étalé sur trois ans : réunir un nombre de caméras cachées suffisant et suffisamment consistantes pour en faire un film, avec une trame d’histoire comme fil conducteur.

Le pich est le suivant : Danny Versavel, escroc minable, purge une peine de prison pendant laquelle il apprend que Sullivan, le fils de quatorze ans qu’il a eu avec une femme décédée pendant son séjour en prison, fait une demande d’émancipation. Touché, le gars décide de s’évader pour “élever” son gamin et lui donner tout l’amour paternel dont il se sent capable. De la part d’un marginal aux repères totalement improbables, cela mène donc à un espèce de “route mouuuuuvie” à la sauce Bruxelles-Wallonie complètement déjanté.

Damiens n’étant plus vraiment une gueule anonyme apparaît donc fondamentalement méconnaissable (quatre heures de maquillage par jour de prise, et on en comprend vite toute la difficulté !), tantôt avec un look d’ennemi public numéro 1 très années 80, tantôt dans la peau d’un espèce de Gérad Depardieu fortement croquignolet. Pas d’acteur professionnel à part lui : quelques personnages-clés nécessaires à assurer le liant de l’histoire, mais avec un casting démentiel : des gens. Des gens piégés dans des situations plus qu’inconfortables.

Tout le génie de ce projet c’est qu’il fallait vraiment s’en remettre à la bonne fortune et tomber sur les gens qu’il fallait au moment où il le fallait. Avec une idée simple, mais efficace : présenter les “héros” malgré eux avec des sous-titres, sans explications supplémentaires, pour quand même signaler à quel moment la fiction est dépassée par la réalité.

Et ça marche, ça marche même très bien. Ce film contient des scènes d’anthologie qui ne pourront que faire date, mais qu’on n’aurait probablement jamais pu scénariser tellement c’est énorme ! Des gens, des vrais, authentiques, humbles ou pas, mais qui démontrent avant tout que nous sommes fondamentalement entourés d’humains, qu’ils existent, et que nous pouvons réellement en faire partie. Il est vraiment difficile de vous donner des exemples sans vous “spolier” une partie de l’ébahissement qui serait capable de vous étreindre lors du visionnage de ce gâteau qui va bien au-delà d’une sorte de compilation genre “le meilleur du best of des plus gros pouêts”.

J’ai véritablement été séduit par cet amalgame jubilatoire. Séduit, mais aussi terriblement embarrassé à beaucoup d’occasions. Pour qui a un minimum d’empathie, certaines scènes vous feront enfoncer la tête dans votre fauteuil en vous disant “mais non, NON, pas ça !!!”.
Comment ne pas ressentir une vague de pitié devant des situations virtuellement ABOMINABLES gérées avec une humanité touchantes par des quidams qui s’en sortent avec soit une bonhomie extraordinaire, soit avec un professionnalisme à toute épreuve, soit avec une abnégation à l’épreuve de toutes les tartes à la crème du monde, ou soit parfois avec une confiance en eux inflétrissable.
Du gardien de parking dépassé par un psychopathe qu’il sent dangereux mais à qui il ne veut pas souhaiter de mal, à la sexagénaire artiste qui lui explique qu’il y a une bibliothèque d’écart entre leurs deux mondes (mythique scène de drague avortée sur la place Flagey), en passant par l’infirmière en proctologie qui a bien du mal à garder son sérieux qui y arrive avec un effort surhumain, ou par les beaux-parents intègres qui oscillent horriblement entre le bonheur de leur fille et le danger flagrant que représente ce barraki en cavale, tout est juste dans leur réaction et dans leur manière d’être. Et Je ne vous parle pas de l’ex-taulard qui a connu toutes les prisons du pays ou de la cliente outrée du marchand de tabac.

Le film est truffé de punch lines, soit de la part des acteurs “scénarisés” (“Open bar, ma tièsse !” chez le chirurgien esthétique, c’est de l’art), soit dans les répliques au tac au tac des victimes, c’est pur bonheur, et qui plus est du bonheur “bien de chez nous”…

Ma conclusion

Un film de gens, avec des gens, pour des gens. J’ai oscillé entre un vrai calvaire (certaines fois je me suis fait violence pour ne pas quitter la salle tellement je ressentais la monstruosité intrinsèque ce certaines situations) et une intégrale jubilation. Il fallait oser, et il fallait oser aller le voir aussi. Je crois que je serais incapable de revoir le film avant longtemps, à la fois car certaines surprises dévoilées perdraient tout leur charme, et aussi parce que je ne voudrais par revivre “volontairement” certains passages qui m’ont vraiment terriblement mis mal à l’aise. Là, il est trop difficile de savoir où vont votre empathie, entre les piégés véritablement “victimes” de la situation, et les anonymes tellement forts qu’on se demande si ce n’est pas plutôt Damiens qui est la victime.

Monstrueusement jubilatoire. Au premier degré.

Mais qu’il est bon de savoir que ce genre de films existe. Et aussi qu’on peut faire ça juste à côté de chez nous, en bas de notre rue.

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